La santé mentale est l'un des éléments clés de la problématique du sans-abrisme car elle peut être aussi bien la cause que la conséquence de la vie en rue. Pour la réinsertion durable des patient·es sans-abri présentant des troubles psychologiques ou psychiatriques, l’accès à un accompagnement et traitement de qualité s’avère donc essentiel.

Les troubles mentaux non-traités alimentent le sans-abrisme

La rue représente aujourd’hui le plus grand hôpital psychiatrique de Bruxelles. Sur le terrain, les équipes d’Infirmiers de rue sont de plus en plus confrontées à des personnes sans-abri qui présentent des problématiques de santé mentale. En effet, environ 70 % de nos patient·es souffrent de troubles mentaux, dont au moins 25 % de troubles psychiatriques tels que la psychose, la schizophrénie ou des névroses.

Cette prévalence s’explique entre autres par la suppression de nombreux lits en institutions psychiatriques, le manque de services communautaires, la pénurie de logements à bas loyers, mais aussi par la présence du public sans-abri en exil qui connaît un risque accru de syndrome post-traumatique.

En l’absence de solutions structurelles, nos équipes doivent s’adapter. Pierre Ryckmans, coordinateur médical à Infirmiers de rue, explique : « Nous référons nos patient·es sans-abri vers des services spécialisés en santé mentale. Il faut prendre rendez-vous, se déplacer, respecter les horaires stricts… C’est simple pour vous et moi mais bien plus compliqué quand on vit en rue. Nous devons les écouter, les rassurer et les accompagner tout au long de leurs démarches, mais aussi faire la médiation avec les services. »

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Le suivi psy est aussi important pour les personnes sorties de la rue

Pour beaucoup de nos patient·es, la remise en logement vient alléger les troubles mentaux liés à la vie en rue, et permet d’identifier les troubles sous-jacents quand il y en a. Pierre : « Une fois le stress de la survie en rue éliminé, nous pouvons identifier les problèmes de santé mentale sous-jacents. Cela peut être un stress post-traumatique, un handicap mental, une névrose… »

Les personnes relogées, comme les personnes en rue, doivent se plier au cadre de la prise en charge de la santé mentale. Pierre : « Parfois, nous avons du mal à les emmener au bon moment chez le psychiatre. Il faut faire des compromis, négocier, s’y reprendre à plusieurs fois. Ce n’est pas évident mais on y arrive. »

Face aux exigences du système, les équipes de terrain ont du mal à trouver des solutions pour les cas les plus difficiles. Ce sont donc les personnes qui ont le plus besoin de soins en santé mentale qui y ont le plus difficilement accès. « Nous servons de béquille dans un processus de prise en charge qui pourrait être plus court et plus adapté. Pour nous, c’est frustrant et paradoxal ! », clôture Pierre.

Pas de fin du sans-abrisme sans accès aux soins de santé mentale

La fin du sans-abrisme est un choix politique ! Afin de permettre un accompagnement de qualité des personnes sans-abri et relogées à Bruxelles, le gouvernement doit augmenter les financements et la capacité de tous les services de prise en charge :

• Les services ambulatoires comme les maisons médicales et les services de santé mentale

• Les institutions psychiatriques suffisamment bas-seuil

• Les institutions spécialisées pour reloger durablement les personne sans-abri présentant des troubles de la santé mentale

Faisons de la santé mentale une priorité de la lutte contre le sans-abrisme !